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 |  Écrit par Ordre des médecins vétérinaires du Québec  |  Article

L’erreur médicale… Une faute déontologique?

Déontologie, lois et règlements Information sur la pratique

La chronique déontologique vous revient avec trois exemples fictifs (et volontairement quelque peu exagérés…) portant sur l’erreur de diagnostic et qui permettront d’illustrer certains concepts déontologiques de base.

Trois cas

  1. X se présente chez le médecin vétérinaire no 1 (MV1) avec son chat domestique âgé, qui présente des symptômes digestifs chroniques. Le MV1, après un bref examen physique, pose un diagnostic de cancer et recommande à son client d’euthanasier l’animal au moment où ce dernier semblera trop inconfortable. Le client, catastrophé par cette nouvelle, retourne à la maison avec son animal et se prépare à l’inévitable. Après deux semaines, toutefois, dans le doute, il décide de consulter un autre médecin vétérinaire. Ce dernier, après un examen, des analyses sanguines et de l’imagerie, conclut plutôt à un problème métabolique sérieux qui, s’il avait été détecté plus tôt, aurait été bien plus facile à gérer.
  2. Mme Y se présente chez le médecin vétérinaire no 2 (MV2) parce que son chien de race Komondor semble moins enjoué que d’habitude. Le MV2 prend l’anamnèse, pose plusieurs questions et effectue un examen approfondi, en décrivant chaque étape dans son La seule anomalie détectée est une légère hyperthermie et un inconfort au niveau de l’abdomen. Le MV2 propose alors un bilan sanguin complet ainsi que des radiographies abdominales, ce que Mme Y accepte. Comme les résultats des tests n’indiquent aucune anomalie significative, le MV2 recommande à sa cliente d’attendre 1 ou 2 jours et de revenir pour une réévaluation, au besoin. Une semaine plus tard, Mme Y consulte un autre médecin vétérinaire, dans tous ses états, car elle a découvert une bosse inguinale sur son animal, qui a éclaté lorsqu’elle l’a touchée, répandant du pus partout sur ses beaux tapis. Ce dernier indique qu’il est évident qu’il s’agit d’un abcès.
  3. Z se présente chez le médecin vétérinaire no 3 (MV3), car son perroquet produit des fientes anormales. Le MV3 prend l’anamnèse et fait un examen physique et conclut que l’oiseau démontre des signes de problèmes digestifs chroniques. Il propose d’effectuer un bilan sanguin complet ainsi que des tests pour des maladies spécifiques. M. Z refuse, alléguant que son animal n’est pas si malade. Le MV3 propose alors un essai thérapeutique, que le client refuse également. Quelque temps plus tard, la mère âgée de M. Z est hospitalisée pour une maladie infectieuse zoonotique, transmise par le perroquet.

Dans les trois cas, les clients sont insatisfaits et considèrent que leur médecin vétérinaire a commis une erreur diagnostique. Chacun d’eux transmet une demande d’enquête au Bureau du syndic, qui, dans son analyse, tiendra notamment compte de trois règles fondamentales qui suivent.

 

Une erreur de diagnostic n'est pas une faute déontologique

En effet, le médecin vétérinaire étant un être humain, qui ne peut être infaillible, une erreur de diagnostic commise de bonne foi n’est pas considérée comme une faute déontologique. Il n’y a d’ailleurs aucun article du Code de déontologie des médecins vétérinaires s’appli- quant à l’erreur diagnostique. Toutefois, le médecin vétérinaire a des obligations concernant la façon d’établir son diagnostic.

 

Le professionnel a une obligation de moyens, et non de résultats

Ceci est soutenu par deux articles du Code de déontologie des médecins vétérinaires :

  1. Le médecin vétérinaire doit exercer sa profession selon les normes de pratique reconnues et en conformité avec les données actuelles de la science médicale. À cet effet, il doit notamment :

élaborer son diagnostic avec une grande attention;

utiliser les méthodes scientifiques appropriées et, si nécessaire, recourir aux conseils les plus éclairés;

3° tenir à jour ses connaissances et maintenir et développer ses habiletés;

4° s’abstenir d’employer, en dehors d’un milieu scientifique reconnu, des moyens de diagnostic ou de traitement insuffi- samment éprouvés.

  1. Le médecin vétérinaire doit s’acquitter de ses devoirs professionnels avec intégrité; à cette fin, il doit notamment :

2° chercher à avoir une connaissance complète des faits avant de donner un avis, un service ou un conseil et exposer à son client d’une façon complète et objective la nature et la portée du problème qui découle des faits portés à sa connaissance;

Le médecin vétérinaire doit donc faire preuve de jugement professionnel pour s’assurer de prendre les moyens adéquats pour établir son diagnostic. Ceci inclut, notamment, de prendre une anamnèse suffisante, de faire un examen physique approprié, de documenter son dossier et de recommander les tests pertinents en indiquant les éventuels refus du client.

 

Il faut se méfier des a posteriori

En effet, ce qui est évident pour un médecin vétérinaire ne l’était pas nécessairement pour un autre, des semaines auparavant. La maladie a pu évoluer, les symptômes peuvent être devenus plus évidents, la réponse aux traitements peut aussi fournir des informations. Le syndic, tout comme les médecins vétérinaires appelés à donner une seconde opinion, doit être très prudent et étudier les faits tels qu’ils étaient lors de la première visite, sans tenir compte des informations additionnelles qui n’étaient, bien évidemment, pas accessibles au MV1 à ce moment.

 

Conclusion

Un syndic, évaluant ces trois dossiers, rendra une décision bien différente si le médecin vétérinaire a effectué les examens et tests appropriés à la situation qu’il avait devant lui au moment des faits (ou s’il les a du moins proposés et expliqués), par rapport à celui qui s’est montré négligent en ne faisant pas l’effort nécessaire à l’établissement d’un diagnostic.