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 |  Écrit par Ordre des médecins vétérinaires du Québec  |  Article

Les concours comme outils promotionnels : un enjeu déontologique

Déontologie, lois et règlements Information sur la pratique Publicité Tenue d'un établissement Technologies

Comprendre les limites pour une pratique vétérinaire conforme.

Nous sommes en 2020. En cette ère où la diffusion de l’information ne connaît presque plus de limites et où les enjeux économiques sont une préoccupation grandissante, les entreprises ressentent le besoin de rivaliser d’imagination pour engranger un maximum de « clics », de « vues » et de « J’aime ». L’adoption de stratégies de marketing est essentielle pour attirer et fidéliser la clientèle et, ultimement, assurer sa pérennité.

Les établissements vétérinaires sont soumis aux mêmes enjeux commerciaux que tout autre type d’entreprise, et leurs propriétaires et gestionnaires pourraient être tentés d’intégrer l’organisation de concours à leur stratégie de marketing afin de favoriser leur visibilité, élargir leur bassin de consommateurs et promouvoir leur image.

Au Québec et dans le reste du Canada, les concours publicitaires sont encadrés par des lois et des règlements que toute personne est tenue de respecter. Quant aux gestes que posent les médecins vétérinaires — en tant que professionnels —, ils sont de surcroît régis par des lois et des règlements précis, notamment le Code des professions et le Code de déontologie des médecins vétérinaires.

Ces dernières années, l’Ordre, et plus particulièrement le Bureau du syndic, a reçu de nombreuses demandes d’information des membres concernant l’organisation de concours dans leur établissement ou chez leur concurrent!

Le terme spécifique de « concours » étant toutefois absent du Code de déontologie, le Bureau du syndic a cru important de solliciter l’opinion de conseillers juridiques afin de s’assurer d’interpréter adéquatement les dispositions pouvant être appliquées à l’organisation de concours et ainsi uniformiser et actualiser ses recommandations et ses exigences à ce sujet.

Ce qui suit a donc pour but d’exposer les grandes lignes de l’avis juridique obtenu récemment afin d’informer les membres de l’Ordre sur les enjeux déontologiques liés à l’organisation de concours et leur permettre d’ajuster leur pratique en conséquence.

Le Code de déontologie des médecins vétérinaires (articles 33 à 44) et le Code des professions (articles 60.1 à 60.3) prévoient des dispositions concernant la publicité, mais ces articles ne traitent pas spécifiquement des concours. Notons tout de même au passage que l’article 38 du Code de de déontologie pourrait, dans certaines circonstances, s’appliquer aux concours.

38. Dans sa publicité, le médecin vétérinaire doit éviter les méthodes et attitudes susceptibles de donner à la profession un caractère de lucre et de mercantilisme. […]

En revanche, l’article 19, paragraphe 3, du Code de déontologie (section « Indépendance et désintéressement ») jette un meilleur éclairage sur la question :

19. Le médecin vétérinaire est notamment dans une situation de conflit d’intérêts s’il:

[…]

3° donne ou offre de donner une commission, une ristourne, un avantage ou une autre considération de même nature relativement à l’exercice de sa profession;

À la lumière de cette disposition, il apparaît que l’organisation d’un concours va à l’encontre des obligations déontologiques du médecin vétérinaire, puisqu’il s’agit d’une façon d’offrir un avantage lié à l’exercice de sa profession et que cela le place en situation de conflit d’intérêts.

Il est également important de souligner que cette disposition du Code de déontologie s’applique de manière identique, indépendamment du fait que le concours soit organisé par le médecin vétérinaire, un employé ou un gestionnaire de l’établissement, ou encore par l’équipe administrative d’un regroupement vétérinaire. En effet, la délégation à un tiers d’un acte relevant des obligations déontologiques d’un professionnel ne soustrait pas ce dernier à ses devoirs et responsabilités. C’est donc au médecin vétérinaire que revient l’imputabilité de toute publicité faite en son nom, et les obligations déontologiques auxquelles il est soumis, y compris celles entourant les conflits d’intérêts, demeurent pleinement applicables.

Cette application de l’article 19(3) du Code de déontologie n’est pas non plus subordonnée au type de prix offert dans le cadre du concours. Par exemple, l’offre d’un prix impliquant la participation d’une entreprise tierce (voyage, carte-cadeau, etc.) n’est pas acceptable en regard de la notion de conflit d’intérêts. Le seul fait d’accorder un quelconque avantage à des clients actuels ou potentiels constitue en soi une dérogation au devoir d’indépendance et de désintéressement du professionnel.

Une décision rendue récemment par le Conseil de discipline de l’Ordre des pharmaciens du Québec va dans ce sens en déclarant l’intimé coupable de s’être engagé, dans le cadre d’une publicité, à verser un avantage — en l’occurrence, un voyage — par le biais d’un concours. Le Conseil s’est prononcé sur les notions d’indépendance professionnelle et de saine concurrence souhaitables dans le milieu professionnel, tout en mentionnant que le professionnel demeurait responsable de toute publicité faite en son nom, même s’il n’en était pas le concepteur.

Autre fait à noter, l’organisation d’un concours dont l’objectif est de recueillir des fonds pour un organisme à but non lucratif contrevient de la même manière à l’article 19(3) du Code de déontologie des médecins vétérinaires, d’autant plus que dans un tel cas, un avantage est conféré à l’organisme et aux personnes qui y travaillent.

En conclusion, l’avis juridique obtenu indique que les lois et les règlements encadrant l’exercice de la médecine vétérinaire ne permettent pas l’organisation de concours, et ce, peu importe l’entité responsable du concours, le prix à gagner, la cause sous-jacente au concours, le moyen de diffusion utilisé ou les conditions établies pour réclamer le prix.

Les lois et les règlements encadrant l’exercice de la médecine vétérinaire ne permettent pas l’organisation de concours, et ce, peu importe l’entité responsable du concours, le prix à gagner, la cause sous-jacente au concours, le moyen de diffusion utilisé ou les conditions établies pour réclamer le prix.

Nous comprenons que dans certains cas, ces informations pourront vous décevoir ou venir entraver vos plans de marketing. Nous estimons toutefois que dans une optique de protection du public, le respect des obligations déontologiques doit toujours prévaloir. Nous sommes persuadés que les médecins vétérinaires et leurs entreprises, grâce à leur créativité et à leur passion, sauront puiser parmi les nombreux autres moyens de faire rayonner leur établissement auprès du public.