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Le traitement des ordonnances en meunerie
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La question du jour :
Est-il normal qu’une meunerie me demande de signer des prescriptions d’aliments médicamentés préremplies? Est-il normal qu’une meunerie modifie ma prescription? Est-il normal qu’une meunerie gère mes renouvellements d’ordonnances?
La réponse en bref : Soyez vigilants!
Le terme « aliment médicamenté » désigne un aliment mélangé à une substance médicatrice. Ce type d’aliment est habituellement préparé par une meunerie, laquelle est considérée comme une pharmacie en gros en vertu du Règlement sur les aliments et drogues. Tout comme une pharmacie, une meunerie ne peut pas vendre de médicaments sur ordonnance, à moins qu’un client lui ait préalablement présenté une ordonnance provenant de son médecin vétérinaire.
La prescription de médicaments vétérinaires, incluant les aliments médicamentés, est un acte réservé aux médecins vétérinaires, parce qu’ils sont les seuls à détenir la formation et les connaissances nécessaires permettant de le faire de façon justifiée et sécuritaire, et qu’ils sont encadrés par des règles déontologiques. En effet, le médecin vétérinaire, avant d’émettre une ordonnance pour un aliment médicamenté, doit respecter les mêmes obligations règlementaires et déontologiques que lorsqu’il prescrit un médicament. Il doit notamment :
- avoir personnellement effectué un examen approprié de l’animal ou du groupe d’animaux
- chercher à obtenir une connaissance complète des faits
- informer le client sur la nature des médicaments prescrits
- contrôler en tout temps les achats, les ventes, l’entreposage et l’inventaire des médicaments
- respecter le règlement sur les ordonnances des médecins vétérinaires
Ce sont des obligations importantes, qu’il ne peut pas déléguer à une meunerie.
La bonne séquence devrait donc être :
- Le client contacte son médecin vétérinaire.
- Le médecin vétérinaire décide, s’il le juge pertinent, de prescrire ou renouveler une ordonnance pour un aliment médicamenteux.
- La meunerie le prépare selon l’ordonnance du médecin vétérinaire.
C’est pourquoi la plus grande prudence est de mise lorsqu’une meunerie se permet d’intervenir dans la partie du processus qui relève du médecin vétérinaire.
À titre d’exemples :
Une meunerie transmet une ordonnance parce qu’un client lui demande un renouvellement qui n’avait pas été prévu lors de la prescription initiale.
Dans cette situation, le médecin vétérinaire devrait d’abord vérifier si l’ordonnance est justifiée, que ce soit en révisant le dossier, en contactant le client pour obtenir les informations nécessaires, en allant faire une visite ou par tout autre moyen. Si l’ordonnance n’est pas justifiée, il doit refuser de signer le renouvellement et en expliquer la raison au client.
Si l’ordonnance est justifiée, le médecin vétérinaire doit ensuite s’assurer que le document prérempli par la meunerie est conforme, qu’il répond bien aux exigences du Règlement sur les ordonnances des médecins vétérinaires et qu’il est suffisamment précis. Sinon, il doit le compléter ou rédiger une nouvelle ordonnance. Dans les deux cas, il pourrait en profiter pour aviser le client qu’il ne devrait pas s’adresser directement à la meunerie pour obtenir des médicaments.
Une meunerie transmet une ordonnance modifiée : l’ordonnance originale du médecin vétérinaire concernait le médicament X, mais le meunier ne l’a pas en stock. Il propose de remplacer le médicament dans le mélange, par le produit Y qu’il a déjà en main.
Encore une fois, le médecin vétérinaire a la responsabilité de faire des vérifications. Si, selon lui, le changement n’entraine aucune conséquence, il peut accepter la modification. Toutefois, si le meilleur traitement pour le troupeau est vraiment le médicament X, il doit refuser la modification et inciter le meunier à se procurer le bon produit.Un médecin vétérinaire a prescrit un aliment médicamenté à un ratio bien précis, qu’il estime essentiel pour le troupeau. Or, la meunerie dispose déjà d’un mélange, mais à une concentration différente. Si le médecin vétérinaire considère qu’un ratio précis doit être utilisé, le meunier a l’obligation de le respecter.
Une meunerie exige la signature d’une ordonnance comportant trois concentrations différentes du même aliment médicamenté, afin de laisser la discrétion au meunier de modifier la concentration selon les besoins qu’il identifie lui-même, ou avec le client (dans l’éventualité, par exemple, où une autre condition médicale se développerait, ou pour adapter le mélange selon la disponibilité des produits).
Bien sûr, le médecin vétérinaire doit refuser de signer une telle ordonnance, en raison de ses obligations déontologiques, mais également parce que le meunier n’a tout simplement pas les connaissances et la formation nécessaires pour disposer d’une telle latitude. Certains clients, et certaines meuneries, tentent parfois de mettre en place un système qui facilite leur travail, sans se rendre compte que, ce faisant, ils risquent de nuire aux animaux et d’avoir un impact sur la santé publique. C’est compréhensible, mais il revient au médecin vétérinaire de préserver son indépendance professionnelle, de s’assurer que les ordonnances qu’il émet sont justifiées, conformes à la règlementation et suffisamment précises, et qu’il exerce un contrôle adéquat sur la vente des médicaments. La vigilance est donc de mise. Pour plus d’informations, voir le chapitre « Ordonnance d’aliments médicamenteux » que vous trouverez dans la section « Autres types d’ordonnances » du Guide sur la gestion des médicaments vétérinaires.